Lourenço – Dos Santos : une passation de pouvoir historique

L’Angola est un Etat africain situé en Afrique australe et centrale. Ancienne colonie portugaise, l’Angola ne décrocha son indépendance à l’issue d’une longue guerre (1961-1975) face au Portugal. Une indépendance obtenue au prix du sang, mais qui n’apaisera pas les tensions pour autant. Le pays sera meurtri par la guerre civile de 1975 à 2002. A l’issue de ce conflit, le pays s’impose comme une véritable puissance économique et militaire régionale, surtout au sein des Etats des Grands Lacs via les deux Guerres du Congo et la guerre civile du Congo-Brazzaville.

Cette croissance économique significative de l’Angola est accordée à l’homme au pouvoir depuis 1976, José Eduardo Dos Santos allias. Une figure admise comme un pilier de l’Etat, que personne ne pensait pouvoir écarter. Indéboulonnable jusqu’en décembre 2016, période marquée par la désignation d’un dauphin, Joao Lourenço, ministre de la Défense. Ce dernier a largement été élu lors des élections générales du 23 aout 2017, mettant à terme à l’ère des Dos Santos.

 

L’ÈRE DOS SANTOS À JAMAIS DANS L’HISTOIRE

José Eduardo Dos Santos fut président de l’Angola de 1979 à 2017, soit pas moins de 37ans de pouvoir. Dès ses débuts lorsqu’il succède au premier président d’Angola Agostinho Neto, Dos Santos est allé dans le sens de la modernisation du pays, que ce  soit par les infrastructures comme par les institutions. Il se maintient au pouvoir durant la guerre civile, éteint progressivement ce conflit sous l’égide des médiations internationales, et écarte ainsi donc ses opposants principaux, dont Jonas Savimbi.

Dès la fin des hostilités en 2002, l’Angola connait une croissance économique record (le taux de croissance économique a crû de 9 % en moyenne entre 2002 et 2008). Et c’est à José Eduardo Dos Santos que l’on attribuera les années fastes de l’Angola durant lesquelles, le pays acquiert son statut de puissance pétrolière africaine. L’Angola devient officiellement le douzième membre de l’OPEP le 1er janvier 2006. En 2017, l’Angola possède la septième armée africaine, est le deuxième producteur de pétrole ainsi que la septième puissance économique de l’Afrique.

Cependant, la chute brutale du prix du baril en 2016 a provoqué une crise économique, qui a très rapidement affecté le quotidien des angolais. Pour la première fois depuis près de quatre décennies, la position d’Eduardo Dos Santos s’est retrouvée fragilisée. Des rumeurs autour de l’état de santé du président circulent, de ce fait,  c’est en partie à cause de cela qu’il ne sollicitera pas le renouvellement de son mandat pour les échéances électorales de 2017. Cependant, il conviendrait à juste titre de rappeler que la fébrilité des administrations angolaises est caractérisée par le népotisme, la corruption et surtout la dépendance quant aux ressources pétrolières et minières.

JOAO LOURENCO : DE L’OMBRE A LA LUMIERE.

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Le 8 septembre 2018, Joao Lourenço est désigné président du MPLA, parti tout- puissant du pays. Un an après son accession à la présidence, il semblerait que Lourenço prennent définitivement les rênes du pays. Jusqu’alors, beaucoup craignaient qu’il n’inscrive dans la continuité de son prédécesseur Eduardo Dos Santos. En effet de secrétaire général du MPLA au ministère de la  défense, Joao Lourenço a cumulé les grandes magistratures stratégiques sous l’ère Dos Santos; Un seul événement laisse transparaitre une tension entre les deux politiciens. En 2002, le président José Eduardo dos Santos annonce qu’il envisage de quitter le pouvoir.  Lourenço se dit lors prêt à lui succéder. Une ambition mal perçue qui lui coutera sa place privilégiée de secrétariat général du parti. C’est la seule fois où Joao Lourenço apparaitra comme un élément dissident.

Ces dernières années, Lourenço est évoqué à plusieurs reprises comme l’un des piliers du gouvernement. Cela n’étonne donc personne lorsque, en 2017, le président en exercice  le désigna comme son successeur. Déchu volontaire de la présidence, Dos Santos reste malgré tout le  président du MPLA, parti dirigeant depuis la décolonisation en 1975. Mais pour peu de temps puisque, un an après, c’est le nouveau président qui est élu à la tête du parti. Une nouvelle victoire face « au camarade numéro un » qui montre bien la volonté de Lourenço de s’affirmer et de marquer une rupture avec son prédécesseur.

UNE PASSATION DE POUVOIR AUX MULTIPLES ENJEUX.

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Cette nouvelle ère Lourenço est symbolisée par la lutte anti-corruption. Une tâche à  laquelle le nouveau gouvernement s’est attelé avec beaucoup d’implication. Et Joao Lourenço n’hésite pas à se mettre à dos le tout-puissant clan Dos Santos. Quelques semaines après sa prise de fonction, Isabel Dos Santos, fille de l’ex-président, encore à la tête de l’entreprise pétrolière nationale Sonangol, s’est vu annuler un de ses contrats signé entre le gouvernement de son père et une de ses sociétés. En décembre de la même année, Isabel est limogé de son poste de patronne de Sonangol. Une enquête pour « détournements de fonds » sera ouverte. Depuis, l’investisseuse est plongée dans un véritable bras de fer avec le président Lourenço. De même pour Filomeno  Dos Santos, frère de Isabel, nommé en 2013 à la tête du fonds souverain du pays. Le 26 mars 2018, le parquet général annonce son inculpation pour « fraude, détournement de fonds, trafic d’influence, blanchiment d’argent et association criminelle ».

Mais face à cette purge exceptionnelle, les critiques ne se sont pas faites tarder. Perçue comme une vendetta politique, Joao Lourenço n’a pas encore convaincu l’ensemble des angolais qui en attendent davantage du nouveau président. En effet, son mandat débute alors que l’économie angolaise est au plus bas. Aujourd’hui la monnaie nationale, le Kwanza, se déprécie à près d’1% par semaine (en moyenne). Cette Angola qui a jouit durant des années de son sous-sol riche en or noir ; qui concourrait à la première place du podium des puissances pétrolières africaines, voit toute ses ambitions remises en causes. Toutefois, il faut souligner la volonté des autorités angolaises à diversifier leur économie, par conséquent, le secteur agraire est au centre des partenariats multilatéraux contractés avec le Fond Monétaire International voire la France.

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En quête de nouveaux investisseurs, Joao Lourenço a rencontré le 28 mai dernier le président Emmanuelle Macron. Lors de cette visite officielle, un accord de coopération en matière de défense et plusieurs conventions agricoles seront signés. Ces derniers traduisent la volonté de l’Angola de vouloir diversifier son économie fortement dépendante des matières premières. En somme, l’Angola, aspire à un renouveau social comme économique, qui ne peut se faire sans de réelles transformations sur la scène politique. Aussi, cette visite peut-être considérée comme une réorganisation de l’échiquier géopolitique en Afrique médiane, notamment en ce qui concerne les échéances électorales qui se déroulent en République Démocratique du Congo depuis fin décembre 2018.

Article rédigé par Fatoumata Tacko Biaye.

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